Le bilan de compétences bientôt exclu du financement par le CPF ?

Contexte actuel

Le bilan de compétences est une action de formation reconnue depuis 1991, permettant d’analyser ses compétences, aptitudes et motivations, afin de définir un projet professionnel ou de formation (article L.6323‑1 du Code du travail).

Il est éligible au Compte Personnel de Formation (CPF) depuis janvier 2017. Le dispositif permet à chaque actif d’utiliser des droits monétaires pour financer son bilan, sans nécessairement l’accord de l’employeur.

Formation et finances publiques : le gouvernement face à un dilemme

Le gouvernement français est aujourd’hui à la croisée des chemins. Pressé par Bruxelles de réduire son déficit public, qui dépasse les 5,5 % du PIB, l’exécutif cherche à tout prix à se rapprocher du seuil des 3 % imposé par les règles européennes. Ce retour à l’équilibre passe inévitablement par un examen minutieux des dépenses de l’État.

Dans cette logique, le Compte Personnel de Formation (CPF), qui a mobilisé plus de 2,6 milliards d’euros en 2023, est dans le viseur. Le bilan de compétences, bien que reconnu pour son utilité dans l’accompagnement des transitions professionnelles, représente à lui seul près de 165 millions d’euros de dépenses annuelles.

Le gouvernement envisage donc de restreindre, voire de supprimer, l’éligibilité du bilan de compétences au CPF, dans le but de réaliser des économies. Pour l’exécutif, il s’agit de recentrer les crédits de formation sur les actions jugées “prioritaires”, comme les certifications métiers directement liées à l’emploi.

Mais cette approche purement budgétaire suscite de vives critiques. De nombreux professionnels de l’accompagnement rappellent que le bilan de compétences ne se limite pas à une logique de rentabilité immédiate. C’est aussi un outil stratégique pour prévenir le chômage, sécuriser les parcours professionnels et encourager la mobilité interne ou externe.

Entre rigueur budgétaire et maintien d’un accompagnement de qualité, le gouvernement devra faire un choix difficile dans les prochains mois. Un choix qui pourrait redéfinir profondément l’accès à la formation pour des milliers de salariés et de demandeurs d’emploi.

Un enjeu financier majeur

En 2023, environ 165 millions d’euros du budget CPF ont été consacrés aux bilans de compétences, soit 7,3 % des dépenses totales du CPF. Les permis de conduire représentent un poste plus élevé (288 M€).

Au total, le CPF finance près de 453 M€ par an pour le bilan de compétences et le permis, et le gouvernement étudie plusieurs pistes pour maîtriser ces dépenses.

Vers un projet de loi de finances restrictif en 2026

Selon le projet de loi de finances pour 2026, l’éligibilité des bilans de compétences au CPF pourrait être supprimée ou encadrée de manière stricte .

Les arguments avancés : la nécessité de mieux piloter la qualité, limiter les abus, et limiter les dépenses publiques via le CPF.

Mesures envisagées

  • Plafonnement du montant pris en charge (entre 1 200 et 1 700 € par bilan), selon des rumeurs encore non confirmées.
  • Instaurer un délai minimal entre deux bilans financés, possiblement autour de 5 ans (rappelant l’ancien modèle antérieur à 2018).
  • Imposer un nombre d’heures plancher pour garantir la qualité de l’accompagnement.

Mobilisation des acteurs du secteur

Les fédérations professionnelles (CIBC, FFPABC, Synofdes, etc.) ont lancé une lettre ouverte à la Ministre du Travail et au ministre de l’Économie. Elles alertent sur les conséquences sévères d’une suppression ou d’un encadrement trop strict du dispositif pour les bénéficiaires et l’économie.

Conséquences possibles

Si le bilan de compétences perd son éligibilité au CPF :

  • Les bénéficiaires devront chercher d’autres modes de financement (AIF, entreprises, finance personnelle).
  • Moins d’accès du public aux bilans, notamment pour les actifs disposant de crédits CPF limités.
  • Risque de baisse de qualité si le coût plafonné décourage les organismes de qualité.

À retenir

Un péril réel plane sur le financement des bilans de compétences via le CPF à l’horizon 2026, dans un contexte de maîtrise budgétaire et de rationalisation des dépenses publiques.

Les acteurs du secteur sont mobilisés pour défendre ce dispositif jugé essentiel pour les transitions professionnelles et structurant dans l’offre de formation. Reste à voir quelles arbitrages seront définitivement retenus d’ici l’adoption finale du projet de loi de finances 2026.